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Réfugiée dans son propre pays : retour en Colombie pour sauver ses enfants de la faim

Ana Ofelia Gonzáles Cantillo a 35 ans. Elle née en Colombie au sein de la communauté Wayuu et a rejoint le Venezuela à l’âge de 5 ans. Les Wayuu sont la plus grande communauté indigène de Colombie et vivent dans une région reculée du pays, la péninsule de la Guarija. C’est un environnement isolé et aride. Les conditions naturelles y sont difficiles et les habitants très pauvres. Ces dix dernières années, plus de 5 000 enfants Wayuu sont décédés à la suite de maladies, de malnutrition et de la soif.
Au Venezuela, Ana a vécu à Nueva Lucha, dans la municipalité de Mara, dans l’état de Zulia, avec son mari, sa mère et ses six enfants jusqu’à ce que la situation économique du Venezuela l’oblige à retourner dans son pays natal.

Le Venezuela avant la crise : une vie simple, mais correcte

Au Venezuela, Ana et sa famille vivaient une routine simple, mais correcte. Elle travaillait en tant que femme de ménage. Ses enfants étaient scolarisés et avaient accès à des soins médicaux. La famille s’est agrandie et Ana a dû arrêter de travailler pour s’occuper de ses deux derniers enfants, qui étaient alors en bas âge. Au même moment, le pays plongeait dans une catastrophe économique sans précédent.

Le Venezuela face à la plus grande inflation mondiale

Le Venezuela traverse une crise économique sans précédent, expliquée par la chute des cours du pétrole, que l’État n’avait pas anticipé et à laquelle il n’a pas su répondre. On estime que d’ici la fin 2018, l’inflation s’élèvera à 14,000 %, du jamais vu ! Le prix des achats alimentaires de base équivaut désormais à cinq fois le salaire minimum. Le pays connait également une pénurie de nourriture et de médicaments, étant donné que la plupart des produits sont importés. La plupart des produits de base sont épuisés. Cela nourrit le marché noir, où certains aliments sont revendus jusqu’à 40 fois leur prix officiel. Face à une situation invivable pour beaucoup de vénézuéliens, le nombre d’émeutes et de pillages a grimpé. Confrontés à la faim et à la violence, près d’un million de vénézuéliens ont traversé la frontière pour se rendre en Colombie depuis le début de la crise en 2014.

Plus qu’un choix, une question de survie : retourner en Colombie pour survivre à la faim

Ainsi, comme beaucoup, le mari d’Ana s’est vu contraint de retourner en Colombie pour y trouver un emploi. Ana s’est alors retrouvée seule, sans perspective, sans argent, avec six enfants de 2 à 12 ans à nourrir. Malgré tous ses efforts, Ana n’était plus en mesure de nourrir correctement ses enfants. Elle a atteint le point de non-retour lorsqu’un de ses enfants, qui n’avaient tous rien mangé depuis une semaine, a frôlé la mort. La décision de quitter le Venezuela s’est imposée comme une évidence. En retournant en Colombie, elle retrouverait son mari, qui avait entre-temps trouvé un emploi, et pourrait espérer sauver ses enfants de la faim.

Le retour en Colombie : un nouvel espoir en demi-teinte

Dès son arrivée en Colombie, Ana a retrouvé espoir. Elle a pu, au début, trouver de quoi nourrir ses enfants correctement. La situation s’est entre temps dégradée. Elle ne travaille pas, son mari non plus, et la famille est de nouveau confrontée à la faim. Ils se nourrissent exclusivement de yucca séché. Ils vivent dans un logement précaire (toit en branches de palmiers et murs couverts de plastique) vulnérable aux conditions climatiques.
Lorsqu’elle pense à sa situation et à ce qu’elle a laissé derrière elle, Ana est parfois éprise de tristesse. Une de ses petites nièces qui vivait au Venezuela est récemment décédée du manque de nourriture. Mais malgré les difficultés, Ana garde espoir. Elle continue à rêver d’une vie meilleure pour elle et sa famille. Elle continue à espérer que son mari trouvera un travail stable et que ses enfants pourront retourner à l’école et bénéficier d’une couverture médicale.
Pour pouvoir aspirer à cette vie, Ana doit résoudre un défi majeur : enregistrer ses enfants auprès de l’État colombien et obtenir des documents officiels. Certaines familles de la communauté Wayuu ont proposé de l’aider en enregistrant ses enfants sous leur propre nom de famille. Mais Ana s’inquiète et doute. Elle a peur de perdre ensuite tous les droits légaux sur ses enfants ; ses enfants pour qui elle s’est battue contre la pauvreté, la faim et le désespoir !



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